Page:Musset - La Confession d’un enfant du siècle, 1840.djvu/185

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— Est-il jeune ?

— Oui, monsieur.

— Est-il parent de madame Pierson ?

— Non. Il était ami de son mari.

— Y a-t-il longtemps que son mari est mort ?

— Cinq ans à la Toussaint ; c’était un digne homme.

— Et ce M. de Dalens, dit-on qu’il lui ait fait la cour ?

— À la veuve, monsieur ? Dame ! à vrai dire… (Il s’arrêta d’un air embarrassé.)

— Parleras-tu ?

— On l’a dit, et on ne l’a pas dit… Je n’en sais rien, je n’en ai rien vu.

— Et tu me disais tout à l’heure qu’on ne parlait pas d’elle dans le pays ?

— On n’a jamais rien dit, du reste, et je pensais que monsieur savait cela ?

— Enfin, le dit-on, oui ou non ?

— Oui, monsieur, je le crois, du moins. »

Je me levai de table et descendis sur la promenade. Mercanson y était ; je m’attendais qu’il allait m’éviter ; tout au contraire, il m’aborda.

« Monsieur, me dit-il, vous avez l’autre jour donné des marques de colère dont un homme de mon caractère ne saurait conserver la mémoire. Je vous exprime mon regret de m’être chargé d’une commission intempestive (c’était sa manière que les longs mots) et de m’être mis en travers des roues avec tant soit peu d’importunité. »

Je lui rendis son compliment, croyant qu’il me quitterait là-dessus ; mais il se mit à marcher à côté de moi.

« Dalens ! Dalens ! répétais-je entre mes dents ; qui me