Page:Musset - Poésies, édition Nelson.djvu/69

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On le voyait, la nuit, écrire assidûment;
Ou quelquefois encor, quand l’astre au front d’albâtre


Efface les rayons de son disque incertain,
Il osait, oubliant sa tâche opiniâtre,
Étudier les lois de ces mondes sans fin,
Flots d’une mer de feu sur nos fronts balancée.
Et que n’ont pu compter ni l’œil ni la pensée!...


Mais, hélas! que de jours, que de longs jours passés
Ont vu depuis ce temps ses travaux délaissés!
Renfermé dans les murs où mourut son vieux père,
Depuis plus de deux ans, sous son toit solitaire
Il vit seul, loin des yeux, — heureux, — car ses amis,
En calculant les jours, n’ont point compté les nuits.
Peut-être en se cachant voulait-il le silence...
Qui savait ses projets? Nul ne connaît celui
Qui le fait sur le seuil demeurer aujourd’hui.
Mais la nuit à grands pas sur la terre s’avance,
Et les ombres déjà, que le vent fait frémir,
Sur le sol obscurci semblent se réunir.
Le repos par degrés s’étend sur les campagnes,
L’astre baisse, — il s’arrête au sommet des montagnes,
Jette un dernier regard aux cimes des forêts,
Et meurt. — Les nuits d’hiver suivent les soirs de près.