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Scène II

Une route.
MONTAGNARDS, passant.
Chanson de chasse dans le lointain.


Chasseur, hardi chasseur, que vois-tu dans l’espace ?
Mes chiens grattent la terre et cherchent une trace.
Debout, mes cavaliers ! c’est le pied du chamois. —
Le chamois s’est levé. — Que ma maîtresse est belle ! —
Le chamois tremble et fuit. — Que Dieu veille sur elle ! —
Le chamois rompt la meute et s’enfuit dans le bois. —
Je voudrais par la main tenir ma belle amie. —
La meute et le chamois traversent la prairie :
Hallali, compagnons, la victoire est à nous ! —
Que ma maîtresse est belle, et que ses yeux sont doux !

LE CHOEUR

Amis, dans ce palais, sur la place où nous sommes,
Respire le premier et le dernier des hommes,
Frank, qui vécut vingt ans comme un hardi chasseur.
Aujourd’hui dans les fers d’une prostituée,
Que fait-il ? — Nuit et jour cette enceinte est fermée.
La solitude y règne, image de la mort.
Quelquefois seulement, quand la nuit est venue,
On voit à la fenêtre une femme inconnue
Livrer ses cheveux noirs aux vents affreux du nord.
— Frank n’est plus ! sur les monts nul ne l’a vu paraître.
Puisse-t-il s’éveiller ! — Puisse-t-il reconnaître
La voix des temps passés ! — Frères, pleurons sur lui.
Charles ne viendra plus, au joyeux hallali,