Page:Myrand - Frontenac et ses amis, 1902.djvu/11

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
xi

Il fallait donc, et d’urgence, supplier à cette lacune dans la preuve documentaire, remplacer par des faits les lettres disparues, étudier enfin la vie de Madame de Frontenac et la justifier, devant l’histoire, des odieux soupçons planant sur sa conduite et pesant sur sa mémoire.

On aurait mauvaise grâce à reprocher à l’auteur le caractère flottant, indécis, de telle ou telle partie de cette étude, ou son hésitation à suivre un plan bien déterminé. Ce défaut de méthode révèle plutôt un défaut de moyens. Non seulement la source historique, l’archive, demeure souvent inaccessible, mais également l’usage du livre spécial lui est refusé. À proprement parler, nous n’avons pas ici de bibliothèques où l’on soit sûr de trouver, comme libre de consulter, tous ses auteurs. Or, la bibliothèque n’est-elle pas le coffre d’outils de l’ouvrier intellectuel, comme les archives sont les matériaux du monument qu’il édifie ? Privez cet honnête artisan de ces deux ressources essentielles et il fera banqueroute à la meilleure des tâches.

Je le répète, cet essai de critique historique est plutôt, quant à la méthode suivie, une causerie littéraire. On s’y entretiendra de Frontenac et de ses amis comme de personnages contemporains, gens rencontrés la veille, coudoyés sur la rue, au théâtre, à l’église, bref, à toutes les étapes de la vie quotidienne. On parlera d’eux comme nous causons nous-mêmes, dans l’intimité d’un salon élégant, de personnes connues, au chassé-croisé des dialogues et des visiteurs, au hasard des interruptions comme au caprice des interlocuteurs qui soutiennent la conversation.

Ce travail de longue haleine, que retardait encore la recherche des documents nécessaires, aura du moins une qualité, la bonne foi ; un mérite, l’étude ; un but, l’hommage offert à l’un des trois plus glorieux noms historiques de notre patrie : Champlain, Frontenac et Laval.

E. M.