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Page:Myrand - Noëls anciens de la Nouvelle-France, 1899.djvu/117

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NOËLS ANCIENS

liber I, à cinq voix, Paris, 1609 ; — Mélanges de musique, contenant des chansons, des psaumes et des noëls, Paris, 1610 ; (c’est dans cet ouvrage que se trouve la mélodie du noël qui nous occupe) enfin des Fantaisies à trois, quatre, cinq et six parties ; Paris, 1610.[1]

Grétry, dans ses Essais sur la Musique, a, plus que tout autre, contribué à propager l’erreur, généralement répandue, qui désigne Henri IV comme l’auteur de l’air touchant sur lequel il adopta les paroles de sa romance, toute remplie de grâce et de sentiment. Comme il ne faut pas donner à César ce qui n’appartient pas à César, il est juste de restituer cette mélodie à son véritable père, à Du Caurroy qui la composa spécialement pour la poésie d’un pieux noël de son époque, cantique que la profane mais Charmante Gabrielle fit aisément oublier.

L’abbé Pellegrin ne voulut pas croire au triomphe définitif de la chanson populaire d’Henri IV sur le noël religieux de Du Caurroy. Avec une audace et un courage qui lui font le plus grand honneur, il voulut recommencer la bataille, reprendre sur l’éternel ennemi, — le monde et ses mille artifices, — le terrain perdu par l’Église, venger la mort du noël ancien par la résurrection d’un noël nouveau écrit sur la musique de Du Caurroy et dont la ferveur ascétique l’emportât sur l’ardeur passionnée de la romance. Il rêva de composer une prière, idéale de candeur, très humble, très douce, très sereine, qui dominât, de toute la hauteur d’une âme éprise de Dieu seul, les joies charnelles et les désirs orgueilleux de l’amoureuse ballade, un cantique enfin supérieur à sa rivale par la noblesse et la distinction des pensées, la délicatesse exquise des sentiments, le bonheur même de l’expression poétique égal à celui de la phrase musicale dans la mélodie tricentenaire.

Donc le vaillant abbé Pellegrin entra en lice contre le chevaleresque Henri IV. Ce remarquable tournoi litté-

  1. Cf : Nouvelle Biographie Générale, tome 9, pages 256 et 257. Firmin Didot Frères, éditeurs, Paris, 1854.