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appliquées par les modernes soit à la découverte de leur affinité, soit à la recherche de leur filiation ; les idiomes de l’Orient, en raison même de leur caractère d’antiquité, ont joué dès le principe un grand rôle dans les rapprochemens téméraires ou forcés, le plus souvent infructueux, qui furent tentés dans l’enfance de cette branche d’étude, avec une persévérance qui honore leurs auteurs ; l’abus que l’on a fait à diverses reprises de l’une ou de l’autre des langues Asiatiques, afin de rendre raison de toutes les autres, nous surprendra moins, si nous tenons compte de la marche longtemps incertaine des linguistes, qui se réduisaient volontairement à l’emploi exclusif d’un seul système d’investigation. Après avoir apprécié la portée des deux méthodes d’abord employées, l’une généalogique, l’autre, physiologique, nous verrons comment une troisième, la méthode ethnographique a fait justice des conjectures et des erreurs accumulées laborieusement par l’emploi des deux premières.

La plus ancienne des méthodes usitées dans l’étude comparative des langues, c’est la méthode généalogique, ainsi nommée, parce qu’elle reposait sur l’idée préconçue de faire remonter toutes les langues à une souche unique ; elle a conduit à rattacher de proche en proche tous les idiomes écrits et parlés à une seule langue, prise pour la mère de toutes les autres, et cependant choisie arbitrairement. Dans les applications diverses de cette méthode que l’on a faites et répétées mainte fois avec une égale confiance, la prétendue harmonie des langues n’était basée que sur des rapprochemens faux, hasardés, en réalité inadmissibles : la ressemblance syllabique de quelques mots suffisait pour qu’une langue fût déclarée, avec la majorité des autres, appartenir à la même descendance d’une langue réputée primitive sans égard ni à l’ensemble des racines ni aux formes grammaticales. Mais le sort en était jeté ; tout devait découler d’une seule et même source, et l’on fondait la science du langage universel sur