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19* LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

par un beau couchant d'automne, elle prend un air digne et resserré qui sent tout-à-fait le grand siècle, dont elle est d'ailleurs par l'âge et par le style. Elle est alors très place Royale, avec on ne sait quoi de plus bourgeois qui tient sans doute à l'unique emploi de la brique appliquée à l'architecture du temps de Louis XIV. C'est un carré parfait de façades à pilastres plats, délimité de chaque côté par une rangée d'arceaux surbaissés où l'on goûte une agréable fraîcheur. Même cette uniformité n'est point faite pour déplaire. Ce n'est pas un décor pour les comédies de Molière, mais peut-être pour celles de Corneille, romanesques, héroïques, empanachées et lourdes, qui semblent d'une Fronde un peu protestante. Après tout, si l'on voulait pousser la pointe à l'extrême, la Réforme fut-elle autre chose qu'une Fronde sérieuse, un peu trop sérieuse même ? Il me plaît pourtant qu'elle ait poussé le sérieux jusqu'à l'absurde, c'est-à-dire à ce point où l'on ne considère plus que la passion toute nue, sans tenir compte des mouvements qui la font agir, ni des conséquences qu'elle entraîne.

Dans cette voie-là, j'irais jusqu'à aimer la cathédrale de Mon tau ban, non pas parce qu'elle renferme le Vœu de Louis XlIIy que je ne suis du reste pas allé voir, mais parce qu'elle me représente la conquête et Ja domi- nation de l'unité catholique sur les variations protestantes. Son appareil extérieur est glacé comme tout ce qui touche à la controverse, mais une certaine masse d'argu- ments pressés et condensés finit par produire de la chaleur. J'y respire un peu l'air de Saint-Sulpice, soit l'esprit de théologie et non de foi, toute une éducation dogmatique de la volonté, un dédain absolu de plaire, et

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