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LES CAVES DU VATICAN 23 1

c'était je crois sans calcul, car il cédait toujours à sa pente, qu'il avait prompte et de plus d'un côté. Il s'occupait de moi, même en dehors de ce qu'en connaissait ma mère ; et je ne laissais pas d'être flatté de l'attachement particulier qu'il me montrait. Cet homme bizarre transforma du jour au lendemain notre existence un peu rassise en une sorte de fête éperdue. Non, il ne suffit pas de dire qu'il s'aban- donnait à sa pente : il s'y précipitait, s'y ruait ; il apportait à son plaisir une espèce de frénésie.

" Il nous emmena trois étés dans une villa, ou plutôt un château, sur le versant hongrois des Karpathes, près d'Eperjès où nous allions fréquemment en voiture. Mais plus souvent encore nous montions à cheval ; et rien n'amusait plus ma mère que de parcourir à l'aventure la campagne et la forêt des environs, qui sont fort belles. Le poney que m'avait donné Wladimir fut pendant plus d'un an ce que j'aimai le plus au monde.

" Au second été, Ardengo Baldi vint nous rejoindre ; c'est alors qu'il m'apprit les échecs. Rompu par Helden- bruck aux calculs de tête, je pris assez vite l'habitude de jouer sans regarder l'échiquier.

" Baldi faisait avec Bielkowski bon ménage. Le soir, dans une tour solitaire, noyés dans le silence du parc et de la forêt, tous quatre nous prolongions assez tard les veillées à battre et rebattre les cartes ; car, bien que je ne fusse encore qu'un enfant — j'avais treize ans — Baldi m'avait, par horreur du " mort ", appris le whist et à tricher.

" Jongleur, escamoteur, prestidigitateur, acrobate ; les premiers temps que celui-ci vint chez nous, mon imagina- tion sortait à peine du long jeûne à quoi l'avait soumise

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