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NOTES 509

��LE ROMAN

��SUEUR DE SANG, par Léon Bloy (Georges Crés, 3 fr. 50).

On réédite ce recueil de contes, paru il y a vingt ans, et inspiré à Léon Bloy par la guerre de 1870, qu'il fit comme mobile. Tous les amateurs de style savoureux tiennent en estime le grand pamphlétaire, et Je m'accuse, les diverses parties du Journal, V Exégèse des Lieux Communs sont pour eux livres de " haulte gresse " ! Ce torrent d'images bourbeuses, ce ruisseau éclatant à la porte d'un teinturier qui se fait des bras d'écorcheur, nous rendent aujourd'hui, bien vivant, en Léon Bloy, un Père Garasse ou un moine de la Ligue. Sueur de Sang n'est pas un de ses meilleurs livres. D'abord on éprouve un certain malaise devant l'horreur imaginaire de ses scènes de guerre : les massa- cres sadiques, les cruautés à l'orientale, et les viols sont fabri- qués avec un excès d'invention, un mépris des vraisemblances, qui ne sont pas du tout de mise dans un sujet et sur une époque pareils. Ensuite les qualités de conteur font quelque peu défaut à Léon Bloy, et ses récits paraissent généralement, dans leur robustesse, bien informes. On songe malgré soi à tels contes de Maupassant, et, plus encore, à l'admirable Foix du Passé, de Villiers de l'Isle-Adam... Mais sur cette rusticité maladroite, quelle puissance et quelle fureur d'empâtements ! Quelle verve d'un Rabelais qui serait poussé à l'horreur, et dont tout le jus de la vigne serait transformé, réellement, en sueur de sang ! L'assaut des Prussiens contre un lupanar où l'on égorge et où l'on saigne les leurs, le canon qu'il leur faut

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