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Page:NRF 11.djvu/880

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874 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

s'élève à la hauteur de ses discours politiques, la Midienne, est une attaque. Il en est de même d'Eschine, avec le Discours contre Timarque. Pour Cicéron, le Pro Milone est bien plutôt un In Clodium, et les plaidoyers proprement dits paraissent en général, sauf peut-être le Pro Murena, assez faibles. Et, surtout, ces grands discours sont assez mêlés à la politique, assez nourris par elle, pour nous apparaître comme les précurseurs de l'élo- quence parlementaire plutôt que de l'éloquence judiciaire.

Le plaidoyer a pourtant atteint une fois au moins sa perfec- tion chez les anciens, et il a eu, mieux que la poésie dramatique et que le dialogue platonicien, l'honneur de fournir le modèle le plus authentique et le plus délicat de l'atticisme. Je veux parler de l'art des logographes et de Lysias. Lysias, étrangement ignoré des honnêtes gens, est chez nous complètement aban- donné aux hellénistes de profession. Il est même singulier que des trente plaidoyers environ qui nous restent de lui, quatre ou cinq seulement, et pas les plus intéressants, aient été, au cours de nos quatre siècles, traduits en français. Et pourtant, comme cette langue transparente et fine, à mi-chemin entre Voltaire et Paul-Louis Courier, récompenserait un traducteur avisée ayant le goût de son humble et délicat métier ! La belle fin à% carrière pour un magistrat lettré d'autrefois, qui se fût ains^ avec de l'ambroisie, débarbouillé de toutes les ridicules pis doiries subies à l'audience ! Comparés aux morceaux qu!l recueillis M. Payen, les plaidoyers de Lysias paraissent les plus jeunes ! Sur eux, pas de poussière, mais au contraire un duvet qui persiste. Et le plus grand plaisir qu'ils donnent, ou, mieux, le plaisir suprême dont ils sont couronnés, est que la raison de leur valeur unique, comparée à ce qui les a suivis et qui les suit encore, se conçoit clairement et nous enrichit de logique : louée soit V anthologie de M. Payen, qui nous permet de mieux distinguer le médiocre et le bon, de connaître l'un et l'autre par leurs causes.

L'art de l'avocat produit des œuvres éphémères, sans forr

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