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��A LA RECHERCHE

DU TEMPS PERDU '

��Ma mère qui m'envoyait avec ma grand'mère à Balbec, mais restait seule à Paris, comprit quel désespoir c'était pour moi de la quitter ; aussi décida-t-elle de nous dire adieu sur le quai longtemps d'avance et de ne pas attendre cette heure du départ oi!i, dissimulée auparavant dans des allées et venues et des préparatifs qui n'engagent pas définitivement, une séparation apparaît brusquement im- possible à souffrir alors qu'elle ne l'est déjà plus à ^iter, concentrée tout entière dans un instant immense de kici- dité impuissante et suprême. Elle entra avec nous dans la gare, dans ce lieu tragique et merveilleux où il fallait abandonner toute espérance de rentrer tout à l'heure à la maison, mais aussi où un miracle devait s'accomplir grâce auquel les lieux où je vivrais bientôt seraient ceux- là mêmes qui n'avaient encore d'existence que dans ma pensée. D'ailleurs la contemplation de Balbec ne me semblait pas moins désirable parce qu'il fallait l'acheter au prix d'un mal qui symbolisait au contraire la réalité de l'impression que j'allais chercher, impression qu'aucun

  • Ces fragments sont extraits du deuxième volume de A la
  • ttcherche du temps ferdu^ intitulé Le côté de Guermantes, qui doit

paraître prochainement chez l'éditeur Bernard Grasset.

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