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RIMBAUD 225

��Tais-toi, c'est l'orgueil ! à présent ^

Ah ! mon Dieu ! Mon Dieu. J'ai peur, pitié ^.

��Orgueil.

��Pitié ! Seigneur, j'ai peur.

��Mais il ne faut pas considérer ces transformations de la phrase au seul point de vue de la quantité. Dans le texte définitif il n'y a pas seulement moins de mots que dans l'ébauche ; il y a aussi une allure nouvelle de ces mots, une rigueur, qui jusque-là n'était pas sensible, de leur groupement. — Nous avons trop insisté sur l'absence de toute cadence lyrique dans la période de Rimbaud pour qu'il ne soit pas nécessaire de revenir maintenant sur cette remarque et de la corriger. Il est vrai que son style ignore l'amplitude poétique, le déroulement verbal à longue échéance. Mais gardons-nous d'en conclure qu'il est amorphe. De même que sa musicalité est intérieure aux mots et comme prise dans leurs syllabes, de même la phrase, si courte soit-elle, est possédée par un rythme qui la tient et la commande comme un démon secret. C'est un de ces " rythmes instinctifs ", avec lesquels Rimbaud se flattait de parler à tous nos sens et que la comparaison du brouillon au texte définitif met en pleine lumière. En passant de l'un à l'autre en effet, nous les voyons naître, s'accuser peu à peu et partout à la fois. Au sein de la masse verbale, vague et lentement tournoyante, que nous présentent les ébauches, une mesure entreprend de se faire sentir, une démarche brève s'empare des phrases sans

^ p. 246 du présent numéro. ^ p. 246 du présent numéro.

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