Aller au contenu

Page:NRF 12.djvu/343

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

NOTES 337

être sortis parce que l'idéalisme est, de nouveau, et pour combien de temps ? à la mode. Et Arnold Bennett en profite pour essayer d'expliquer, sérieusement, sans arrière-pensée, et simple- ment, comme il aborderait un passant, comme on parlerait à un voisin de table, ce que c'est que la littérature, aux chers indif- férents. Il leur dit que la littérature n'est pas un passe-temps comme le golf ou la marche ; et qu'elle n'est pas non plus une forme supérieure du luxe, la suprême chose que s'offre un parve- nu, quand il a réuni autour de lui tous les signes extérieurs de la richesse. Et pour développer le goût des lettres chez les gens du monde, il indique deux bons moyens : commencer par l'étude des classiques et comparer, mêler sans cesse leurs œuvres à la vie quotidienne. Il se donne la peine d'indiquer les prix des éditions courantes des classiques anglais, et dresse une liste d'ouvrages, formant une bibliothèque anglaise assez complète, qui reviendrait à trois ou quatre cents francs seulement. Enfin il recommande la lecture d'ouvrages philosophiques fondamentaux, et a ce mot heureux : " L'assimilation d'un système équivaut souvent, pour un homme littérairement aveugle, à l'opération de la cataracte." En bon Anglais il recommande la lecture des Premiers Principes d'Herbert Spencer. Et, en passant, tous les problèmes les plus intéressants et les plus difficiles de l'esthé- tique sont abordés, et parfois très justement et efficacement traités (par exemple le problème du Style, où Arnold Bennett se rencontre avec Benedetto Croce).

Ce petit livre est en même temps un document assez curieux sur l'état d'esprit du public et particulièrement du public anglais contemporain. " La nation poétique par excel- lence, dit Bennett, est précisément celle où la poésie est, actuelle- ment, le plus en défaveur. " Et le dernier chapitre sur la " capitalisation mentale " nous fait comprendre le mécanisme psychologique de cette extraordinaire déperdition intellectuelle qui nous étonne souvent chez les Anglais, qui lisent beaucoup, chez les Allemands, qui lisent davantage encore, et en général

11

�� �