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LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE 3

rager dans une intention que certains trouveront peut- être déplacée, c'est, dirons-inousfranehement, qu'une telle revue nous apparaît autant que jamais indispensable, c'est que la guerre a pu changer bien des choses, mais pas celle-ci, qtie lalittérature est la littérature, que l'art est l'art. Elle a pu peut-être — ' c'est à voir — diminuer encore leur importance dans les préoccupations des homnies ; elle n'a pas pu modifier leiir essence. Aujour- d'hui comme hier, et malgré des millions de morts, il reste vrai qu'une oeuvre est belle pour des raisons absolu- ment intrinsèques, qu'on ne peut démêler que par une étude directe, que par une sorte de corps à corps avec. elle Aujourd'hui comme hier, et malgré des monceaux de ruines, il reste vrai que la création artistique est un acte original, que créer c'est peut-être avant tout ne rien sentir, ne rien vouloir d'autre que ce qu'on fait. Aujourd'hui, par conséquent, comme hier, et malgré les scrupules qu'on serait tenté d'éprouver, il reste néces- saire de purifier et de maintenir exempte de toute influence étrangère, l'atmîGsphère esthétique.

Et après tout, est-ce bien là une entreprise aussi intem- pestive qu'il peut sembler au premier abord ? Est-elle dans un antagonisme aussi net qu'on pourrait le croire avec les nécessités et les convenances de notre époque ? Je me demande si l'âge où nous entrons n'a pas besoin au contraire, d'abord, d'une certaine gratuité.

A côté de son action régénératrice, il ne faut pas en effet oublier les méfaits immenses de la guerre. Un des plus graves est peut-être d'avoir préoccupé les esprits ; elle s'est mise à leur dicter toutes leurs

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