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Page:NRF 13.djvu/242

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234 l'A NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

venait vers moi, raide comme un I, me prouvant que tous deux du moins avaient même poids. Il tint, pour me convaincre, à déplier le Moïse, enroulé dans des cartes de fronts qui ne servaient plus, et justement orien- tales, Dardanelles, Basse-Serbie, il l'ajustait dans le matin, changeant de hauteur et de place, quand se dérobait le gouffre de lumière qu'il voulait aveugler avec un Natoire. Nous étions à l'heure exacte où fut sauvé Moïse, on comparait la Voulzie au Nil, on voyait que Natoire utilisait pour son aurore un vieux coucher de soleil. Puis je partis, tenant sur mes genoux la petite Délie, ainsi qu'un enfant rapporte de la ville un bocal de poissons rouges, prenant toute la journée la France de biais, et gardant sur nos voitures, nos uniformes, les mêmes écharpes transversales d'ombre et d'éclat, jockeys fidèles. Or, le soir même, j'étais étendu dans un lit, à l'hôpital de Châteauroux, avec des ballons de glace sur le ventre, et l'on craignait une appendicite aiguë. J'étais dans une chambre à deux lits, peinte en blanc, près d'un adjudant blessé qui s'occupait à tuer les innombrables mouches avec une orange en caoutchouc. Souvent, et sans qu'on pût le prévoir, car la salle était arrondie aux angles, l'orange partait par la fenêtre dans la rue, et toujours, sans qu'il fût besoin de sonner ou de crier, elle revenait, parfois au bout de quelques secondes à peine, parfois d'un long mo- ment. Parfois une main qu'on voyait la posait sur le rebord, main tantôt grande, tantôt petite et comme d'un être plus ou moins lointain, et la balle venait à nous en roulant. Vers quatre heures, à la sortie du pensionnat, revinrent par des mains égales, des cerises, des fleurs, des journaux. Puis l'infirmi ère-major entra prendre mon

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