Page:NRF 13.djvu/276

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

268 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

OU de deuil, devait traverser vingt jeunes hirondelles. Puis, pendant dix secondes à peine, erreur d'un jour si jeune, une ondée ; dans les gazons, sur les sauges, la liqueur du matin fut lavée ; des sabots tapèrent le trottoir ; sur le toit plat de la maison du général Ber- trand (construite, colonne par colonne, fronton par fronton, d'après celle qu'il habitait à Sainte-Hélène et qui jamais ne reçut une goutte de pluie), les gouttes crépitèrent ; les gommiers, les caroubiers, les baliviers, toutes les boutures rapportées de là-bas, par le bel Arthur avec le corps de Napoléon, furent soudain ver- nissés comme dans les gravures. Qu'il eût aimé recevoir cette averse, lui justement. Napoléon, qui regardait en vain chaque nuage et, toute la première année d'exil, tendait la main, croyant recevoir une goutte, comme pour qu'un aigle revînt s'y poser... Elle cessa soudain. Les ânes abandonnés contre le trottoir laissèrent en repartant, au- dessous d'eux, leur image sèche. Puis le coq chanta ; une eau pénétra la terre, mélange d'eau et de rosée. Puis un rayon traversa ma chambre, enveloppant mon lit sans me toucher, ainsi que le fait la foudre, mais je pouvais l'attein- dre de la main. Puis j'entendis une automobile arriver, appeler de trois coups de trompe, comme les dames qui viennent prendre un jeune romancier pour une prome- nade... Puis des murmures indistincts... Puis aboya un chien, de qui du moins je reconnus la voix... puis le sable crissa, l'automobile froissa des buis, des fusains... Pavel était parti.

Alors, mon infirmière de la nuit entra, toute fraîche, un peu humide, car elle avait reçu l'ondée, elle cria à mon voisin (car elle avait soigné des Zélandais à Bapaume) :

�� �