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Page:NRF 13.djvu/743

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LA SYMPHONIE PASTORALE

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��soit, ce soir il est tard, et Ton n'y voit pas suffisamment. Je veillerai, pour entretenir le feu auprès duquel dormira la petite. Demain nous lui couperons les cheveux et la laverons corame il faut. Tu ne commenceras à t'occuper d'elle que quand tu pourras la regarder sans horreur.

Et je la priai de ne point parler de cela aux enfants.

Il était l'heure de souper. Ma protégée, vers laquelle notre vieille Rosalie, tout en nous servant, jetait force regards hostiles, dévora goulûment l'assiette de soupe que je lui tendis. Le repas fut silencieux. J'aurais voulu raconter mon aventure, parler aux enfants, les émouvoir en leur faisant comprendre et sentir l'étrangeté d'un dénuement si complet, exciter leur pitié, leur sympathie pour celle que Dieu nous invitait à recueillir ; mais je craignis de raviver l'irritation d'Améhe. Il semblait que l'ordre eût été donné de passer outre et d'oubUer l'évé- nement, encore qu'aucun de nous ne pût assurément penser à rien d'autre.

Je fus extrêmement ému quand, plus d'une heure après que tous furent couchés et qu'AméUe m'eut laissé seul dans la pièce, je vis ma petite Charlotte en tr 'ouvrir la porte, avancer doucement, en chemise et pieds nus, puis se jeter à mon cou et m'étreindre sauvagement en murmurant :

— Je ne t'avais pas bien dit bonsoir.

Puis, tout bas, désignant du bout de son petit index l'aveugle qui reposait innocemment et qu'elle avait eu curiosité de revoir avant de se laisser aller au sommeil :

— Pourquoi est-ce que je ne l'ai pas embrassée ?

— Tu l'embrasseras demain. A présent laissons-la. Elle dort, lui dis- je en la raccompagnant jusqu'à la porte.

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