Aller au contenu

Page:NRF 13.djvu/765

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

LA SYMPHONIE PASTORALE 757

âgée qu'il ne nous avait paru d'abord. Il semblait qu'elle prétendît tourner à profit sa cécité, de sorte que j'en venais à douter si, sur beaucoup de points, cette infir- mité ne lui devenait pas un avantage. Malgré moi je la comparais à Charlotte et lorsque parfois il m'arrivait de faire répéter à celle-ci ses leçons, voyant son esprit tout distrait par la moindre mouche qui vole, je pensais : « Tout de même, comme elle m écouterait mieux, si seu- lement elle n'y voyait pas ! »

Il va sans dire que Gertrude était très avide de lecture ; mais soucieux d'accompagner le plus possible sa pensée, je préférais qu'elle ne lût pas beaucoup — ou du moins pas beaucoup sans moi — et principalement la Bible, ce qui peut paraître bien étrange pour un protestant. Je m'expHquerai là-dessus; mais avant que d'aborder une question si importante, je veux relater un petit fait qui a rapport à la musique et qu'il faut situer, autant qu'il m'en souvient, peu de temps après le concert de Neuchâtel.

Oui, ce concert avait eu lieu, je crois, trois semaines avant les vacances d'été qui ramenèrent Jacques près de nous. Entre temps il m'était arrivé plus d'une fois d'asseoir Gertrude devant le petit harmonium de notre chapelle, que tient d'ordinaire mademoiselle de la M... chez qui Gertrude habite à présent. Louise de la M... n'avait pas encore commencé l'instruction muèicale de Gertrude. Malgré l'amour que j'ai pour la musique, je n'y connais pas grand'chose et ne me sentais guère capable de rien lui enseigner lorsque je m'asseyais devant le clavier auprès d'eUe.

— Non, laissez-moi, m'a-t-elle dit, dès les premiers tâtonnements. Je préfère essayer seule.

�� �