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NOTES 80I

appréhension que l'on voit sortir de telles reliques des tiroirs où leur auteur les avait confinées. Dans le cas actuel, cependant, l'initiative des héritiers n'est pas sans justification. Non pas que les Cloportes puissent ajouter grand 'chose à la gloire de Jules Renard. Ils ne font qu'éclairer son œuvre et d'une façon qui intéresse davan- tage les gens de métier, les critiques et les romanciers que le public. Mais c'est là une qualité qui a sa valeur.

Les Cloportes sont le premier roman de l'auteur des Histoires Naturelles. Il l'écrivit, nous dit son préfacier, M. Henri Bachelin, qui le connut de près, à l'âge de vingt- trois ans, de l'année 1887 au 30 juin 1889, en s'in- terrompant pour donner quelques nouvelles. Plusieurs fois le livre fut annoncé, mais Jules Renard ne se décida pas à le pubHer.

Quelles furent les raisons qui l'en dissuadèrent ? — Nous ne les connaissons pas, et celles que nous donne M. Henri Bachelin, c'est seulement de l'étude de l'œuvre de Jules Renard, et un peu comme de lui-même qu'il les tire. Elles paraissent pourtant vraisemblables : « Une certaine drama- tisation de la vie... contre quoi, dès 1890, il commença de protester par sa production personnelle. Déjà il avait pris en aversion les combinaisons d'intrigues romanesques qui, selon lui, au lieu d'agrandir la vie ou de la creuser en pro- fondeur, n'aboutissent qu'à la déformer, les grands gestes éperdus qui lui paraissaient caricaturaux, les fins à effet, les récits rétrospectifs, en un mot tout ce qui n'était pas l'expression exacte de l'existence humaine dans ce qu'elle a de plus ordinaire et dépouillée de tout ce qu'il considérait omme oripeaux de sentimentalité romantique et de faux métier naturaliste. » Ajoutons que Jules Renard, de nature méticuleuse, fut toujours difQcile pour lui-même. Avec les Cloportes, il inaugurait son écriture tout influencée par le style artiste des Concourt et il était tout naturel qu'il se

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