l'enfant qui s'accuse 887
— Tu es né quand ? Le nom de ton père ? Tu sais lire et écrire ? « Je reconnais que mercredi dernier, en montant des bagages à la Mattraie, j'ai pris un porte-monnaie qui était sur le coin de la table. Je l'ai pris en montant le second colis. J'ai cru que c'était un portefeuille. Il conte- nait, etc. Quelques instants plus tard, je l'ai caché dans la paille de l'étable aux porcs. Le lendemain, craignant d'être découvert, j'ai jeté l'objet dans l'étang. » Regrettes- tu ce que tu as fait ?
L'enfant pleure de nouveau, mais comme à regret, sans détresse visible, sans abandon. Il fait un signe de tête. Le brigadier dicte :
— Je regrette l'action que j'ai commise. Maintenant signe. Tu sais signer ?
Le gendarme fait remarquer :
— Puisqu'il sait lire et écrire...
Le moment me paraît affreusement solennel. L'en- fant s'approche et signe. Il a franchi la limite légale qui sépare l'honnêteté du crime. Il est de l'autre côté.
Je signe à mon tour une déclaration où, invoquant les aveux et l'âge du coupable, je prie M. le Procureur qu'aucune suite ne soit donnée à l'affaire.
Sur le seuil, le brigadier se h vre à une dernière exhortation :
— M. Jacques a retiré sa plainte, mais n'oubhe pas qu'il peut toujours la renouveler. Est-ce vrai ce que tu nous as conté ? Tu as déjà menti à M. Jacques. Mais mentir aux gendarmes, c'est encore bien plus grave.
— Oui, c'est vrai que je l'ai jeté dans l'étang.
Dans l'après-midi, je prie Dolet de lever la vanne. Mais nous nous y sommes pris trop tard : l'étang ne sera
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