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906 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

Le lendemain je vais, sur la demande du juge, récla- mer au maire la feuille de la contre-enquête. Justement il allait l'envoyer. Il me la montre. Seules y sont impor- tantes les déclarations des deux instituteurs qui ont eu affaire à Julien. Celui de Courville dit qu'il ne l'a connu que peu de temps, mais qu'il n'a jamais eu à se plaindre de lui ; celui de Rauval au contraire déclare qu'il l'a tou- jours considéré comme un enfant anormal et singulier, que Julien a volé im porte-monnaie à Rauval et que son oncle a dû restituer la somme. Cette fois, c'est le coup de grâce, car si l'affaire est poursuivie, rien ne prévaudra contre un tel précédent.

Aussi je pars sur-le-champ pour P... où je vais voir le juge d'instruction. C'est un honrnie jeime, intelligent. Nous sommes sauvés. Tout de suite la question est placée sur son vrai terrain. Le juge d'instruction s'intéresse à la criminalité enfantine; au bout d'un quart d'heure j'ai gagné ma cause. Il me promet d'examiner l'affaire de très près. Selon toute vraisemblance elle sera classée; on se contentera d'ime forte admonestation.

Un mois plus tard, Julien est convoqué devant le tri- bunal de P. On le laisse s'y rendre seul. C'est la première fois, paraît-il, qu'il prend le chemin de fer. On pense qu'il rentrera vers deux heures. A six heures du soir il n'est pas encore de retour. On commence à chuchoter: « Parbleu, il s'est sauvé. » Dolet, qui comptait sur lui pour faner, est de mauvaise humeur. Moi, je ne suis pas tranquille: avec ces sacrées enquêtes et ces tribunaux, est-ce qu'on sait jamais? Je redescends à Maisonneuve après mon dîner. JuHen sort justement de table. Je l'appelle :

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