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LA SYMPHONIE PASTORALE 93 1

— Ne me dites pas cela, pasteur. Je sais que cela n'est pas vrai.

— Je t'ai dit ce qu'il était décent de te dire, pro- testai -je. Mais en effet les lois de la nature per- mettent ce qu'interdisent les lois des hommes et de Dieu.

— Vous m'avez dit souvent que les lois de Dieu étaient celles mêmes de l'amour.

— L'amour qui parle ici n'est plus celui qu'on appelle aussi : charité.

— Est-ce par charité que vous m'aimez ?

— Tu sais bien que non, ma Gertrude.

— Mais alors vous reconnaissez que notre amour échappe aux lois de Dieu ?

— Que veux-tu dire ?

— Oh ! vous le savez bien, et ce ne devrait pas être à moi de parler.

En vain je cherchais à biaiser ; mon cœur battait la retraite de mes arguments en déroute. Eperdument je m'écriai :

— Gertrude... tu penses que ton amour est coupable ? Elle rectifia :

— Que notre amour... Je me dis que je devrais le penser.

— Et alors ?... Je surpris comme une supplication dans ma voix, tandis que, sans reprendre haleine, elle achevait :

— Mais que je ne peux pas cesser de vous aimer. Tout cela se passait hier. J'hésitais d'abord à l'écrire...

Je ne sais plus comment s'acheva la promenade. Nous marchions à pas précipités, comme pour fuir, et je tenais son bras étroitement serré contre moi. Mon âme avait

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