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NOTES 123

nationaux. " Tel serait le moyen " de parer, dans la Société des Nations, à l'étranglement des faibles " — ou bien, peut- être, d'y assurer sans guerre la prépondérance des forts.

Domination des compétences pour le bien du plus grand nombre ; c'est, au fond, le rêve du Saint-Simonisme, rajeuni, retrempé au contact de l'action. L'auteur entend partir des faits: " Il ne faut croire aucune prédiction, aucun poète, si l'image qu'il trace de l'avenir ne luit pas déjà dans le réel, contemplé^ cela va de soi, avec hardiesse et liberté. " Mais il refuse de lire les faits à la seule lumière de l'intellect : " La pensée logique peut servir de fondement au droit et à la coutume, jamais à une table des valeurs, à une moralité au-dessus de toute objection... Dans le royaume de l'âme, tous les phéno- mènes et catégories du monde intellectuel auront cessé d'exis- ter ; et en même temps l'individualité combative, la caducité et la science intellectuelle... La volonté prime l'intelligence... Tout vouloir est fait d'amour et de prédilection qui ne se démontrent pas... Nous vivons et agissons sans cesse dans le monde du transcendant ".

Cette transcendance doit nous inquiéter. Il est certain que ce n'est pas la logique qui crée la vie, et que la tendance, le vouloir, précède toutes les raisons. Mais il n'est pas moins certain que ce vouloir primitif ne sait point ce qu'il veut, et qu'une tendance tourne à la passion aveugle et fatalement combative, quand elle ne se mesure pas à d'autres par un échange de raisons. Le mysticisme du vouloir n'est d'ailleurs pas une nouveauté : la notion d'une volonté absolue domine, depuis Fichte, la pensée allemande. Nous savons où elle l'a conduite : non pas du tout au triomphe des passions indi- viduelles, mais à l'exaltation du vouloir national. Pour le moment Rathenau n'en est pas là. Mais on craint que la même nuée ne reste grosse du même éclair.

Bien que Rathenau repousse les plans de conquête et de domination, il confesse " cette foi allemande, qui est au-dessus

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