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150 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

sa soif de musique et veiller seulement à ce que ces hommes de génie ne tiennent pas une place excessive sur les programmes de nos concerts. Paris n'a jamais entendu tant de musique et il y a place pour tous : maîtres du passé, du présent et de l'avenir.

Avant la guerre, deux grandes associations symphoniques ouvraient leurs portes chaque dimanche à la foule des amateurs. Les Concerts Colonne jouent maintenant deux fois la semaine et l'excellent orchestre Pasdeloup se fait entendre le jeudi, le samedi et le dimanche, pendant que M. Camille Chevillard demeure fidèle aux exécutions dominicales. Sans cesse, on apprend la création de nouveaux concerts et les affiches des récitals qui chaque jour se donnent, couvrent les murs de Paris. En vérité, il y a place pour tout le monde et pourtant, à part de rares exceptions (les concerts Golschmann ou Delgrange par exemple, qui associent heureusement l'art du présent et l'art du passé), — quelle monotonie dans les pro- grammes ! Toujours les mêmes noms, la même sonate, le même concerto, la même mélodie, la même symphonie, le même quatuor ! Quand on pense aux trésors inexplorés de la musique ancienne et même de la musique classique, on se sent pris de découragement devant tant d'ignorance, devant une telle absence de curiosité. Grâce à la gravure et à la photographie, les chefs- d'œuvres de la peinture sont depuis longtemps populaires, mais hélas ! pour la musique, il faut d'abord un savant qui transcrive le texte original en notation moderne, puis un éditeur qui consente à le publier, enfin des musiciens qui l'exécutent et un public qui s'y intéresse. Tout cela exige du temps, de l'argent et beaucoup de zèle et de patience. Un Mendelssohn en Allemagne aux beaux jours du Romantisme, tout récemment un Charles Bordes, un Henry Expert, un Vincent d'Indy ont lutté courageusement pour l'éducation musicale du public, pour la vulgarisation des grandes œuvres oubliées, mais combien reste à faire ! Que connaît-on à Paris des merveilleux créateurs

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