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loisirs de Cambridge ! Mais c’est une vie saine et monotone qui fortifie son corps et laisse toute liberté à son esprit. Autour de lui, des paysages tristes et grandioses : d’un côte, à perte de vue, les plaines mamelonnées, jusqu’à l’Océan Pacifique; de l’autre, les énormes chaînes encore incomplètement explorées, toutes couvertes de neige ; une végétation de caractère nettement tropical, mais terne et rabougrie ; et de vastes fleuves dont les crues soudaines ressemblent à des cataclysmes ; solitude et silence : un panorama représentant une époque géologique antérieure à l’apparition de l’homme.

Du reste Samuel Butler ne réside pas continuellement à Mésopotamie. De temps en temps il va passer quelques semaines au chef-lieu de la province de Canterbury, Christchurch, où il retrouve la civilisation : en effet, il y a là les fontionnaires, un cercle et une " société ", un grand nombre des éleveurs étant, comme Butler, " gentlemen et fils de gentlemen ", qui ont passé par Cambridge ou par Oxford. En 1862 il s’y fonde un journal La Presse, et Butler y collabore activement.

Cependant dès la troisième année de son séjour, il songeait déjà à rentrer en Angleterre. En cédant son pâturage, en vendant son troupeau, et en plaçant la somme ainsi réalisée au taux légal de la colonie, 10 pour 100, il se trouverait en possession d’environ vingt mille francs de rente annuelle. C’est ce qu’il fit dans les premiers mois de 1864. Il avait, à force d’énergie, doublé son capital et conquis une aisance modeste qui lui assurait l’indépendance matérielle. Il n’avait donc plus rien à faire en Nouvelle-Zélande : l’Europe, Londres, la peinture l’attiraient. Ainsi, le 15 Juin 1864, il partit,