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7'52 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

mes entrés et dont la guerre n'aura été qu'un épisode modifiera dans le quart de siècle qui vient presque tous nos points de vue. Pour le moment nous sommes réduits à quêter et à recueillir des indications. La guerre a coïncidé avec la disparition de nos deux derniers grands critiques traditionnels, Lemaître et Faguet. Comme, en outre, il n'y a pas de genre qui soit plus perméable que la cri- tique aux influences du dehors, il est naturel que les préoccupa- tions morales et nationales d'hier et d'aujourd'hui y aient pris quelque place, et, sans d'ailleurs la transformer ni même la réformer, l'aient amenée parfois à une orientation digne d'être signalée.

C'est le seul point commun à ces deux ouvrages, d'esprit si opposé. M. Le Bidois est un critique moraliste, discret, fin, pondéré, imbu d'anciennes et bonnes traditions. Son ouvrage « pour plus ou moins littéraire qu'it puisse paraître à quelques-uns, est avant tout moral. Il n'a point pour objet propre de faire admirer la beauté dé nos lettres — elles suffiront bien seules à se révéler admirables. Mais qu'avons-nous à faire, aujourd'hui surtout, d'une admiration stérile ? Par le beau, pour le bien, en ce mot d'ordre a tenu pour l'auteur, au cours d'une vie déjà longue, toute la discipline litté- raire. » Ce sont des sentiments qu'on doit respecter et qu'on peut discuter. Toujours est-il que M. Le Bidois a été assez heureusement inspiré en isolant dans notre littérature ce sentiment de l'honneur et en le suivant de la Chanson de Roland à Octave Feuillet, à tra- vers nos poètes, nos moralistes, nos romanciers. On goûtera sur- tout ses analyses très fines de Corneille, de Racine, de Moh'ère. J'aime moins son dix-neuvième siècle. La plus grande place y est faite à Augier et à Feuillet, mais il n'y a pas un mot sur Balzac. L'honneur mondain n'est pourtant pas le seul. César Birotteau, avec les dessous vivants qui le lient à la personne de Balzac, était peut- être plus digne d'être noté et apprécié que le Roman d'un jeune homme pauvre, œuvre d'une platitude écœurante. Le Javert des Misé- rables figure une hyperbole bizarre de l'honneur qui pouvait être relevée (sévèrement si on voulait^ au passage. Et, puisqu'une longue et bonne analyse était consacrée à la Princesse de Clèves, pourquoi pas une étude sur l'honneur féminin dans le roman moderne, sur Madame de Mortsauf, sur la Madeleine de Dominique, sur Madame

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