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Page:NRF 14.djvu/768

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762 LA NOUVELLE REVUE FRAN*,AISE

exemplaire. Tout peintre, fùt-il de génie, subit l’empreinte des artistes qui l’environnent. La modulation cézannienne est le tribut que paya le grand primitif à l’école impressionniste dont il sortit — (comme Renoir et Seurat) — et, depuis lui, les cubistes que M. Emile Bernard lui-même considère comme ses disciples directs, ont trouvé des moyens plus simples et moins individuels de moduler les surfaces, c’est-à-dire de les animer de façon à les empêcher de devenir décoratives. Cet article de Bernard, qui décèle des aspirations aussi louables que mal orientées, est extr(^mement dangereux en ce sens qu’il propose des solutions inactuelles aux problèmes que se pose toute conscience avide de retrouver les grands rythmes traditionnels. Nous nous proposons de préciser prochainement nos idées sur ce sujet émouvant et de réfuter cet article injuste qui, s’il était pris au sérieux, porterait atteinte aux intérêts spirituels de toute la jeune génération.

Thiesson trop « intelligent » — picturalement parlant - pour ne pas être « sensible », eut vite compris, devant les dernières toiles de Cézanne, d’un chromatisme si ardent et si mesuré, que l’effort de ce maître qu’après tant d’autres il avait élu, s’orientait de plus en plus vers une étude des possibilités plastiques que peuvent contenir nos sensations de peintres épris d’absolu et rajeunis au contact de la plus immédiate réalité.

ANDRÉ LHOTE

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��DARIUS MILHAUD

M. Camille Saint-Saëns a déclaré un jour qu’il produisait de la mu. sique «par une fonction de sa nature, comme un pommier donne des pommes». Malgré sa banalité, cette métaphore s’impose à mon esprit quand je veux caractériser la fécondité de Darius Milhaud. Les bran- ches ploient, le sol est jonché de fruits. Prenez et mangez. Vous vous exclamez? La pomme était verte. Cell >ci, un peu aigrelette, est d’une saveur imprévue. En voici plusieurs qui sont véreuses, mais admirez celle-ci dont la peau est dorée, l’arôme puissant, la pulpe juteuse !...

Certains écrivent de la musique par un effort soutenu de volonté. Le travail est pour eux une souffrance heureuse. D’autres sont brusque- raient possédés par l’inspiration comme par une fièvre intermittente, d’autres créent en se jouant. Milhaud ignore ces labeurs, ces extases.

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