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Page:NRF 15.djvu/194

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la nouvelle revue française

Enobarbus. — C'est déjà vieux : ensuite ?

Eros. — César-Octave, après avoir profité de Lépide dans cette lutte contre Pompée et avoir eu raison de ce dernier, a refusé de reconnaître en Lépide son égal ; il ne supporte pas qu'il revienne à Lépide aussi quelque gloire de cette expédition ; bien mieux, il l'accuse d'avoir entretenu avec Pompée une correspondance secrète, et le fait saisir sans autre forme de procès. Voici donc le pauvre triumvir qui attend, entre quatre murs, que la mort enfin l'élargisse !

Enobarbus. — Ainsi donc, Antoine et César demeurent seuls en présence. Comme une paire de mâchoires qui se referme sur le monde, tout ce que le monde peut jeter entre eux d'aliments, ne les empêchera pas de grincer.

Eros. — Où est Antoine ?

Enobarbus. — Il se promème autour du camp, foule aux pieds les joncs du rivage en murmurant : l'imbécile ! (Il pense à Lépide !) et menace de mort l'officier qui crut bien faire en le débarrassant de Pompée. Cléopâtre l'a rejoint et le suit partout ; elle prétend prendre part à la guerre. Mais si maintenant nous devons emmener au combat, avec les chevaux, les juments, celles-ci auront bientôt à porter à la fois le cheval et le cavalier. Je l'ai dit tout net à Antoine, mais Canidius, qui sait tirer profit de sa présence, plaide pour elle et remporte une cause que d'avance les secrets désirs d'Antoine ont gagnée.

Eros. — Le voici... mais ce n'est peut-être pas le moment de lui parler.

Enobarbus. — Tu n'as rien à lui dire qu'il ne sache.