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668 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

universel — les éléments nés de l'an.ilyse précédente. Qui douterait de la fidélité qu'eut Cézanne à cette méthode de travail n'a qu'à voir, chez M. Vol- lard, ses derniers paysages. Non seulement les végéta- tions et les maisons sont débarrassées de leur caractère particulier, anecdotique, mais il n'y a plus au sens où l'entend le réalisme de Courbet, ni maison, ni arbre, ni terrain « proprement dits ». Un vaste rythme, ici verti- cal, là giratoire, entraîne tous les éléments du spectacle en une trombe cohérente et figée. Les objets se défont, se dénouent, se mélangent en ne laissant émerger d'eux- mêmes, dans cette assemblée compacte, qu'une partie significative, angle d'un toit et d'un mur, courbe d'un tertre, cannelures et entonnoir d'une masse de feuilla- ges, dôme et volute d'un nuage, derniers témoins de l'analyse précédant cette synthèse. Comment pourrait- on désormais juger ces œuvres sous l'angle de l'harmonie classique ? Les mots bouche-trous adorés des critiques paresseux : cadence, ordonnance, profondeur, atmos- phère, coloris, perdent ici tout sens. Le rythme ne pro- vient plus d'un échelonnement gradué et majestueux des arbres et des « fabriques » comme dans les tableaux du Poussin, mais il est semblable au mouvement du chaos s'organisant selon l'ordre cosmique. L'ordonnance n'est plus cette distribution des objets selon l'importance que lui accorde une convention immuable (semblable à celle qui englobe les lois de la civilité honnête), mais une spéculation strictement plastique sur des différences de dimensions tout abstraites. La profondeur ne rappelle plus nos souvenirs de touristes et ne flatte plus notre goût des promenades.

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