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BEAUTÉ, MON BEAU SOUCI 85

Elle avait dit « ce monsieur » parce que sa mère pou- vait l'entendre, mais d'un regard elle avait, en même temps, demandé pardon à Marc d'employer une expres- sion aussi cérémonieuse et distante. Et, tandis que les doigts appliqués et un peu durs de Ruby balbutiaient « The sweetest flower that blows » et« When other lips » sur le mauvais piano que Marc louait au mois, le jeune homme se demandait si Queenie avait pris son amie pour confidente de leur... — comment cela pouvait-il s'ap- peler ? — de leur amitié ? enfin, de cette espèce d'amour d'écoliers qui aurait dû n'avoir aucune importance pour un homme qui voulait se croire blasé. « C'est peut-être pour qu'elle me voie qu'elle l'a amenée... Mais en atten- dant elle nous gêne un peu, sa jolie amie. »

Mais elles savaient si bien feindre, toutes les deux ; elles avaient un air si indifférent, si tranquillement amusé, que Marc se reprit à douter que Ruby eût reçu les confidences de Queenie. Et du reste il était fort possible que Queenie attachât moins d'importance que lui à leurs baisers, et qu'ils ne fussent pour elle qu'un jeu, et un jeu auquel elle était depuis longtemps habi- tuée... Pourtant, cette jupe allongée, — si évidemment à cause de lui... Ah, il aurait voulu être seul avec elle, ou tout au moins que M""= Croslandse fût éloignée pour quelque temps.

Ces pensées l'occupaient encore pendant le goûter, auquel ils se mirent plus tard que d'habitude, et qu'ils firent très copieux, ce qu'on appelle un « haut thé », parce qu'ils avaient l'intention de ne pas dîner, M"" Crosland se sentant un peu indisposée, et la ser- vante ayant congé. Ce fut pendant le goûter que Queenie

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