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86 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

lui fît savoir qu'elle habitait pour le moment chez les parents de son amie, à Richmond, oij elle avait été invi- tée à passer quelques jours. Alors Marc comprit qu'il y avait là une occasion à saisir.

— M™'= Crosland, dit-il, puisque vous êtes fatiguée, j'accompagnerai ces jeunes filles jusqu'à Richmond.

Edith consentit. C'était un grand point de gagné. Mais pourvu qu'à la fin elle ne se décidât pas à venir avec eux elle aussi ! Marc n'eut plus de repos jusqu'à ce qu'il se vit dans la rue avec Ruby et Queenie... Au moment où il allait sortir, Edith l'avait appelé : « M. Fournier, s'il vous plaît ? » Il l'avait trouvée dans sa chambre, un peu agitée, et elle lui dit :

— Vous savez que je vous confie ce que j'ai de plus cher... après vous, ajouta-t-elle à voix plus basse en répondant à son embrassement. Et il ne put s'empêcher de remarquer trois minces traits parallèles sur son front et deux légers plis aux coins de ses lèvres.

Comme il soitait eiîfin, elle lui dit :

— Oh M. Fournier, c'est si drôle de vous voir avec ces deux chevreaux ! » d'un ton qui ne lui plût guère.

Marc et les deux chevreaux marchèrent d'abord en silence et assez loin les uns des autres, dans la rue vide, qui avait cet air hagard et résigné des dimanches d'été. Mais au premier tournant, Queenie vint se placer au côté de Marc et lui dit en riant :

— Maintenant, Marc, laissez-moi porter votre canne, s'il vous plaît.

Il la lui donna, tout ému qu'elle l'eût appelé par son prénom. C'était la première fois ; et en regardant Ruby, il comprit, au sourire qu'il vit passer dans ses yeux,

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