intelligibles, que nous nous sommes risqués à faire une comparaison qui paraît d’abord choquante, entre cet apôtre de la raison et de la mesure, et Lamartine. Nous aimerions à suggérer qu’il est possible de haïr romantiquement le romantisme lui-même. Le romantisme est un excès d’émotivité, et l’émotion n’est pas nécessairement un état qui s’exprime, elle peut résider au contraire dans le fait d’en réprimer l’expression. Cet excès, d’ailleurs, peut aussi bien être excès de crainte qu’excès d’amour. Généralement parlant, le romantisme peut se distinguer du classicisme par son attitude envers le mystère fondamental de la vie : l’élément d’infini que celle-ci contient. Le triomphe du classicisme consiste à accepter cet élément et à lui trouver sa place, à le reconnaître, sans pour cela nier la raison ; et nul art n’a droit à l’épithète de classique qui ne se pose le problème de la totalité. La tendance du romantisme est de se montrer préoccupé, hanté par le sentiment de l’infini ; et cette préoccupation revêt deux formes. Nous avons les romantiques par nature, comme Lamartine, qui passent alternativement des pleurs à l’extase ; et les romantiques à rebours, comme M. Maurras, qui cherchent à exorciser le démon, -.ou sont persuadés, comme les « Christian Scientists », que l’esprit malin s’évanouira, si seulement ils savent l’ignorer tout le temps nécessaire. Pour M. Maurras, l’infini représente le chaos, et son évangile de l’ordre est fondé sur son horreur du chaos. Ayant expérimenté le chaos en sa propre personne, il en tire la conclusion que les impulsions des hommes n’ont en elles-mêmes rien de raisonnable, et ne peuvent être » rangées », que si on les soumet à l’autorité et au contrôle de quelque faculté du dehors. La raison est un apanage social — non pas individuel — et la vérité une sorte de découverte sociale, la tâche principale de la société consistant à façonner l’individu en conformité avec elle
Il pourrait sembler que les idées de M. Maurras sont trop extrêmes, pour mériter qu’on les prenne en sérieuse considération. Elles requièrent néanmoins notre attention, à cause de la grande influence qu’elles exercent. M. Maurras est le chef et l’inspirateur d’un parti fort et uni, et tout disposé, si l’occasion s’en présentait, à traduire ses paroles en actes. C’est le caractère d’efficacité de ses écrits, qui semble avoir déterminé