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442 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

m'entendez — tout cela, nous l'avons sucé avec le lait maternel, nous avons grandi avec, enfin cela nous a pénétré jusqu'à devenir os de nos os et chair de notre chair. Vous le voyez, dès le départ, nous sommes en contact avec le miraculeux, nous savons, en tout cas, qu'il a existé autre- fois : quel est dans cette discussion qui va du connu vers le mystérieux, le premier pas que nous faisons, que nous sommes forcés de faire ? Evidemment celui-ci : « Ce qui a été jadis, pensons-nous, peut encore être aujourd'hui. Puis- que le fantôme de Samuel est apparu à Saûl, il va de soi que l'esprit de mon frère peut m'apparaître à moi. » Allez dire cela à votre professeur ! Que répondra-t-il ? D'où vient cette première ombre de doute sur son front naguère si brillant de foi ? « De telles choses ont été, dira-t-il, et assu- rément de telles choses peuvent être encore : mais je conseille la méfia?ice aux yeux, aux oreilles, à restomac et, par-dessus tout, à voire cerveau, a moins qu'il ne s'agisse de votre arrière-grand' mère, toutes les fois qu'on viendra vous proposer un fantôme. '» En fin de compte, on fait un compromis : C'est entendu, nous avons aujourd'hui un moyen de communication, tout comme au temps de Saiil ; seulement le moyen dif- fère : Comment, quand et où le trouver ? à nous de cher- cher. Je demande alors : n'est-il pas tout naturel qu'une personne née dans ce monde et ayant subi l'empreinte d'un tel enseignement débute avec la ferme espérance et le désir sincère de trouver sa part personnelle du secret, — bref son fantôme particulier ? J'entends une personne née pour regarder dans cette direction, car les natures sont diverses : voyez, par exemple,, l'espèce des peintres ; tel homme vivra cinquante ans sans savoir si l'herbe est rouge ou verte, — « // est absolument insensible à la cou- leur », dites-vous ; — tandis que tel autre, tout enfant, ramasse et met de côté des cailloux polis, à cause de leurs taches bleuâtres et de leurs veines rosées : « Donnez-lui sans tarder une boîte à couleurs... ! » De même, je suis né, moi,... vous ne me permettez pas de dire « médium »... mettons :

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