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écoutée, elle était bouleversante, tant elle contraignait à des retours sur soi-même, à des remises en question. Ces deux belles figures de femmes, celle que ses deuils ont blessée jus- qu'à détruire en elle toute volonté de revivre, et celle qu'ils n'ont blessée que dans sa faculté d'oublier, quelle magnifique illustration de cette fidélité dans le souvenir dont Jacques Rivière faisait plus haut une des caractéristiques de l'esprit français !
Il faut souhaiter qu'en volume, La Paix ait un retentissement que, malgré tout l'art et le dévouement de ceux qui montèrent la pièce, la scène n'a pu lui donner. D'autres œuvres de Marie Lenéru étaient achevées avant la guerre. Il en est une, en tout cas, qu'elle refusa de laisser jouer après l'échec du Redoutable. « Je ne veux pas, écrivait-elle, passer pour celle qui réhabilite toutes les vilenies. » Aujourd'hui le malentendu n'est plus pos- sible. Nous avons le droit de connaître en sa totalité l'œuvre de celle qui écrivit Les Affranchis.
JEAN SCHLUMBERGER
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��CELUI QUI A REÇU DES GIFLES, â^AndreïeJf, joué par la troupe Pitoëff au Théâtre Moncey.
Ce n'est pas sans être légèrement éberlué que l'on sort du Théâtre Moncey après avoir vu jouer Celui qui a reçu des gifles. Cet ébahissement, mêlé d'irritation et de fatigue, est assez sur- prenant si l'on ne songe qu'à l'action banale, simple, presque linéaire de la pièce.
Certains n'y veulent voir qu'un ordinaire mélodrame. Il est conforme en vérité aux traditions du genre qu'un homme jadis riche, aimé et presqu'illustre puis trompé, pillé, plagié, s'engage dans un cirque comme pitre. Q.u'il se prenne pour une jeune et belle écuyère d'un amour affectueux, qu'il l'em- poisonne pour la soustraire aux entreprises d'un baron riche mais défraîchi qui la veut épouser, c'est encore dans l'ordre du mélodrame. Et il est tout aussi logique qu'il s'empoisonne à son tour, devancé d'ailleurs par le baron qui lui inflige ainsi une suprême gifle.
Mais en une telle pièce l'action est sans la moindre impor-
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