196 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE
Voici du reste une pièce qui donne le ton général du recueil et qui est une des meilleures :
Le silence de la musique Et les angoisses de Tristan Le péché, r extase physique... Cette pâleur qu'elle me tend.
Un crépuscule amer et rose Par la fenêtre ouverte entrait Sur ton cou quelque impure rose Balançait son coupable attrait.
Tes yeux, ta volonté muette, Clos pourtant aux désirs humains, Brûlaient, criaient de fièvre inquiète Connue tes mains, comme tes mains.
��Cette heure atroce de délice Te poursuit-elle ? voudrais-tu Fouler encor jusqu'au supplice ' La vanité de ta vertu ?
]'ai soif du néant... La souffrance Est la volupté de la foi. Toute douleur est délivrance : Je veux soufirir, délivre-moi.
A travers ce lyrisme tumultueux, complaisamment tumul- tueux, on discerne l'accent d'un cœur tourmenté et la plainte de la chair blessée ; mais le ton dramatique altère le vrai son de la souffrance humaine. C'est qu'il y eut en Joachim Gasquet, une volonté d'expansion, une surabondance de tempérament, un besoin d'e:\iérioriser violemment et de façon grandiose ce qu'il portait en soi de force sans objet. Vint la guerre où son goût du beau geste trouva l'occasion de se déployer magnifiquement. Il s'y donna avec l'enthousiasme que l'on sait. Puis il en célébra les hienfaifs et la grandeur et l'on aurait tort de sourire ou de s'offusquer : comment n'eût-il pas trouvé bienfaisante et sublime cette maîtresse monstrueuse à laquelle il vouait les trésors de courage et de fierté que la vie avait laissés sans emploi. Cette muse au sein cruel combla ses vœux de martyr prédestiné :
�� �