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326 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

— Quels élèves as-tu vus au camp, avant d'arriver ici ? lui ai-je demandé tout d'abord.

— J'ai vu tous.

— Que t'a dit Amadou Saar ?

— Lui va arriver ce soir à Técole.

— Et Yatma ? et Fôdé ? et Mahava M'Ba ?

— Tous^ tous ils va venir,

— Et Inahilé, viendra-t-il aussi ?

— Non, lui y a fatigué trop pour venir.

— Fatigué ? à la section hors rang ? Non, Moussa^ Inahilé n'est pas fatigué. Inahilé est fâché contre moi, c'est bien triste.

Moussa ne répond rien, il baisse la tête. Mais, tandis que j'insinue ensuite qu'Inahilé a sans doute trouvé, pour rem- placer mon école, la bonne volonté d'un camarable blanc, les traits de Moussa se tendent si fort que je crains qu'ils n'expulsent l'œil qui devient saillant. Perfidement j'ajoute encore :

— J'ai de la peine de ne plus le voir ici, près de nous, mais si tu peux m'apprendre qu'il a trouvé quelqu'un pour corriger ses devoirs là-bas, j'en serai bien heureuse pour lui, quand même.

Moussa se redresse à ce vœu, comme si je l'avais insulté lui-même. Toute son âme pousse hors de sa gorge des négations violentes qui me giflent sévèrement.

— Non ! lui Inahilé il a pas faire école, dans le camp, là-bas ! lui y a pas demandé jamais n'autre personne pour faire prendre lire comme vous ici !

Cependant, le capitaine Vie a été intrigué par ma conver- sation des jours précédents concernant ma classe et, comme il a rencontré Inahilé dans le camp il lui a demandé :

— Pourquoi toi y a plus aller l'école avec camarades ? Y a pas bon l'école ?

— Si, mon capitaine.

— Quand l'école y a bon, faut pas manquer l'école, faut revenir ce soir.

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