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CHRONIdUE DRAMATIQUE 615

L'interprétation de La Fraude est excellente. La troupe du Vieux-Colombier n'est décidément composée que de gens de talent et qu'on devine sans cesse occupés défaire mieux encore. M. Romain Bouquet, par exemple, que j'ai vu jouer à peu près dans tous les spectacles du théâtre, m'avait paru être toujours le même, comme débit, allure et physique. Il a été, cette fois- ci, à tous ces points de vue, un tout autre homme, transformé exactement à la mesure de son rôle.

Une jeune femme est courtisée par deux hommes : un sau- vage, un bourru, aux sentiments ardents et exclusifs, peu habile aux belles paroles et aux manières de salon, — et un jeune bellâtre diseur de riens agréables, coqueluche des femmes, voyant l'amour comme une partie de plaisir, et uni- quement désireux de l'ajouter à la liste de ses conquêtes. Elle se décide pour ce dernier, tant il est vrai que les femmes aiment surtout à être amusées et flattées et que l'extérieur compte seul pour elles. C'est le sujet de Au petit bonheur. Le dialogue est agréable, et, en même temps, insignifiant comme cette jeune femme et l'homme qui lui plaît. Celui-ci, prié par elle, au cours de sa visite, de lui écrire quelque chose sur son album, y inscrit sans scrupule cette « pensée » : « L'amour est un ruisseau qui reflète le ciel ». On nous apprend dans la suite que c'est là du Renan. C'est une jolie niaiserie.

M. René Benjamin, qui a écrit sur les Justices de paix de Paris un livre infiniment amusant, plein d'observations vraies, a publié, sous le titre Antoine déchaîné ', une sorte de reportage qui a fait du bruit. M. Antoine partait à Arles tourner le film de VArlésienne. M. René Benjamin l'a accompagné. Il nous le montre là dans tous ses faits et gestes. Rien d'inventé. Aucune flatterie. Aucune transposition. M. René Benjamin nous le dit dès le début : ce Homère appelait Achille Achille, Hector Hec- tor. » Il fera de même. Il proteste d'ailleurs à chaque page de son récit de son amitié et de son admiration pour sou modèle. Nous avons donc là un portrait véridique de M. Antoine. On va, par quelques extraits, juger de sa séduction.

M. René Benjamin nous montre d'abord M. Antoine dans

��I. Les Œuvres libres, vol. 3, Fayard, édit.

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