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Page:NRF 17.djvu/79

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LE SECRET DU POLICHINELLE 75

Il s'interrompit. Il observa un paratonnerre. Il avait un peu l'air d'écouter une Voix Intérieure, ou plutôt, de solli- citer d'elle une audience.

— Ils ne m'ont rien dit du tout, repartit Victor, qui craignait la suite.

— Les hommes et les femmes.... commença l'oncle. Victor souffrait tant qu'il pria malgré lui et malgré la

bassesse de Dieu.

— Seigneur, faites qu'il ne me parle de cette injustice ! • — Les hommes et les femmes.... répétait l'oncle.

Il ne regardait pas son neveu déchiré par l'angoisse, son neveu ne le regardait pas démonté dans sa belle assurance. Ils avaient peur d'entendre l'un deux prononcer ce qu'ils savaient tous les deux. Les attitudes où naît la vie han- taient leur imagination et leur mémoire détournées.

A ce moment, le deuxième oncle, la tante, la jeune cou- sine parurent sur la terrasse, poussant un bouquet de cris joyeux.

M. Saintour et Victor renvoyèrent la bienvenue. Tandis qu'ils avançaient et que les autres descendaient l'escalier, l'oncle chuchota :

— Victor, si jamais l'un de tes camarades te fait des histoires sur le mariage, tu viendras me voir et nous cau- serons.

Il regarda son neveu enfin. C'était un beau regard tout de même, franc, courageux, et malgré un peu de sottise^ bon.

— Oui, répondit Victor.

Mais que pensait-il en son langage ignominieux d'éco- lier ! Que se représentait-il, déshonoré, dans le délire d'une fureur meurtrière, dans la convulsion d'une rancune ascé- tique contre la vie !

Dans un petit miroir rond, vite, à la dérobée, il chercha si ses traits n'en reproduisaient pas trop crûment l'affreuse honte. Trop pâle, avec de longues joues froides, avec des yeux agrandis et enfoncés, il détesta son pauvre visage.

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