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76 LA NOUVELLE RE\UE FRANÇAISE

La jeune femme n'écoutait guère ; elle lui regardait les lèvres et les yeux. Elle eut peur, de la même façon que l'oncle auparavant ; elle tenta de faire dévier ce que \'^ictor pensait,

— Ah oui, dit-elle, l'anglais, l'algèbre... Tu sais, je l'ai passé, mon brevet, ce n'est pas si difficile...

Elle allait lui en conter les péripéties, il ne la laissa pas commencer.

— Ah, Mariette ! fit-il du ton de son enfance, il y a des choses bien pires ! Je ne pourrai jamais y arriver ! Vois-tu, toi tu es bonne, maman et Marceline sont bonnes, Lucienne est bonne... Mais il y en a de méchantes !...

Il s'arrêta. La honte d'avoir parlé l'oppressa. Sa tante attendit qu'il continuât, et comme il se taisait, elle mur- mura :

— Il faut souffrir pour grandir.

On les appelait. La bonne servait. Sur la première mar- che de l'escalier, l'oncle Alfred informa M. Saintour :

— Ce garçon-là est encore bien innocent.

M. Saintour sourit, avec une fatuité dont il se corrigea gentiment en désignant sa fille :

— Marceline le surveille.

Mais en même temps, la tante Marie avertissait sa sœur :

— Il ne faudra pas trop nous occuper de Victor ce soir. Je crois qu'il a du chagrin.

— Bah ! dit cette maman si raisonnable, le jour de sa fête !

��IV

��Il fallut s'asseoir et se sourire. Les fleurs de la nappe embaumèrent. Une fumée tiède s'éleva du potage. Les cuillers tintèrent doucement. Le crépuscule, comme un oiseau doré, couvait le jardin sous ses grandes ailes.

Victor, tout en buvant sa soupe, compta ses amis et ses

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