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5 50 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

teur et qu'autour de nous reprend le dangereux tonnerre des wagonnets.

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��... Les quatre wharfs de Rufisque prennent racine dans le sable même de la plage, mais à une hauteur suffisante pour échapper aux effets des levées ordinaires ; quant à la marée, elle est presque insignifiante sur ces côtes-là.

La plage est donc bordée par un terre-plein sableux assez large, où pourrissent les résidus habituels d'un port. Les rues de la ville viennent déboucher sur ce quai naturel.

Nous garant donc des wagonnets, nous avons d'abord été arrêtés par un douanier noir ; il s'est montré devant une guérite de ciment, avec cette allure désabusée qui est de règle en France dans sa profession ; il avait l'œil triste et la figure mélancolique ; il habitait sans ridicule une sorte d'uniforme composite d'où sortaient par en bas ses deux pieds nus.

Il a mis peu de mots et peu de gestes à rafraîchir les souvenirs topographiques de M. Chabaneix. Mon superbe capitaine n'endurait toutefois qu'en piaffant la position subalterne où ce court incident le plaçait vis-à-vis d'un indigène par ailleurs philosophe et vite résigné.

La première chose que Rufisque me montrait pendant ce temps était une perspective rectiligne assez vide ; une voie Decauville la parcourait sur toute sa longueur et des. constructions basses la bordaient. L'angle que cette rue formait avec le quai était occupé par une maison sans étage d'une blancheur offensante ; une de ses fenêtres était ouverte ; il s'y tenait une figure que je n'oublierai jamais plus, tellement c'était celle-là même que mon enfance et mes romans d'aventure devaient députer à nia rencontre.

Imaginez la fiction du vieux empirique noir, du vieil esclave de coulem' que toutes nos lectures nous ont, depuis Fenimore Cooper et Beecher-Stowe, rendue familière. Essayez de ressusciter cette face camuse, ces yeux sangui-

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