6^2 LA NOUVELLE REVUE EPsANÇAISE
— Les droits, il les avait, tous, tous !
— Il ne s'agit pas de droits, mon amie, mais de votre •.chagrin.
Alors, avec une extrême difficulté, elle parvient à dire :
— Autrefois, un pareil chagrin... m'aurait paru plus affreux que la mort même... mais vous m'avez appris...
Elle ne trouve pas à formuler quoi et reprend au bout d'une minute :
— Vous m'avez montré que mon mari méritait de l'af- fection... pour plus de raisons qu'on ne le croyait autour de lui...
Il sent qu'elle l'attire vers une pente où il s'est promis de 3ie plus glisser :
— La première de ces raisons, dit-il, c'est qu'il ne s'est pas défendu lui-même, puisqu'il est resté sur le front ; c'est donc à nous qu'incombe sa défense.
Mais l'argument est bien abstrait ; c'est un réconfort jdIus sensible qu'elle mendie. Il ajoute :
— Dans un monde où presque personne ne l'est, il s'est montré dévoué, affectueux.
Elle abonde aussitôt :
— Il était excessivement bon.
Malgré la pitié qu'il ressent, l'expression l'agace. Pour- quoi les femmes emploient-elles toujours les mots les uns pour les autres ? Il rectifie :
— Extrêmement bon...
Mais, dans sa détresse, Clymène ne peut y voir qu'une ■approbation qui la fait poursuivre :
— Et parce qu'il était modeste, comme on a calomnié 50n intelligence !
Cette fois Vernois sent les mots se refuser. Il se leurre de l'espoir qu'elle n'attend pas de réponse précise ; mais la voilà qui commence à trembler et ses mains à lutter l'une contre l'autre. Ce n'est pas de tendresse qu'elle a besoin après l'humiliation de tout à l'heure, c'est de fierté. Est-ce en un jour pareil qu'il va lui dérober son soutien ? Alors en
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