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LE CARNET DES ÉDITEURS 3

Georges Imann : LES NOCTURNES. Un vol. in-i6 double couronne, de la Collection « Le Roman », publiée sous la direction d'Edmond Jaloux \

Y crois-tu maintenant au complot des Nocturnes, Chantecler ?

ce sont ces vers de Rostand que Georges Imann place en épi- graphe : ils situent et résument son livre entier.

Nous sommes en pleine guerre, à Genève. De la lutte par les armes n'arrivent que la sourde rumeur des canons d'Alsace et les convois lamentables des grands blessés. La Suisse n'est plus qu'une prodigieuse ambulance, une grande oasis de charité. Et pourtant on s'y bat avec la même âpreté que sur les divers fronts. Mais la lutte est cachée, perfide : la trahison remplace les cbus. Le monde interlope des tripots cosmopolites, les déserteurs des pays de l'Entente, tous les néfastes comparses de l'Internationale dorée sont là, à l'affût de profits éventuels, d'inavouables trafics, et la horde des proscrits russes — étudiants faméliques, vagues professeurs ou médecins, juifs échappés aux pogromes, — devient entre leurs mains un redoutable instrument de dé- sordre, manœuvré au nom du communisme pour le profit de l'ennemi.

C'est le bolchevisme à sa naissance.

Et Georges Imann nous conduit dans la curieuse boutique du juif Ouritzky, siège d'un comité révolutionnaire russe dont les principaux membres sont aux gages de l'Allemagne. On y recon- naît des figures sinistres, et la mentalité de ceux qui préparèrent l'horrible tragédie soviétique s'éclaire d'un jour nouveau.

C'est de ce repaire que partent vers les usines de France, le Creusot en particulier, d'occultes fomentateurs de grèves.

Ida di San Carvagno, Russe d'origine, femme du consul de Sardie et la maîtresse à la fois du chef anarchiste Medviedoff et du consul français, se charge, à l'aide d'intrigues qui condui- ront ce dernier au suicide, d'obtenir les passeports.

Autour de cette femme, type accompli de l'espionne, qui fuira vers la Russie quand enfin grondera la révolution, gra- vitent d'attachants personnages, qui font de l'ouvrage un roman vécu, riche d'action et de couleur, livre d'histoire et d'actualité, s'il en fut, plein d'une psychologie troublante et aiguë.

JEAN DES BONNESFEUILLES

I. 6 fr. 75. Bernard Grasset, éditeur, 61, n:e des Saints-Pères, à Paris (Vie).

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