Après le repas, je priai Isaïe d’accorder au monde la révélation de ses œuvres perdues ; il me dit qu’il ne s’en était perdu aucune qui eût quelque valeur. Ezechiel me parla de même.
Je demandai alors à Isaïe pour quel motif il était allé, corps et pieds nus, durant trois ans. Il répondit : « Pour le même motif qui fit aller ainsi notre ami Diogène, le Grec. »
Je demandai à Ezechiel ce qui le fit manger des excréments et rester si longtemps de suite, gisant sur le flanc droit ou le flanc gauche ? Il répondit : « Le désir d’élever les autres hommes jusqu’à la perception de l’infini : les tribus de l’Amérique du Nord ont des pratiques semblables ; et celui-là est-il honnête qui résiste à son génie ou à sa conscience, pour le seul amour de ses aises et d’une présente satisfaction ? »
L’ancienne tradition, selon laquelle le monde doit être consumé par le feu, au bout de six mille ans, est vraie, ainsi que je l’ai appris de l’Enfer.
Car le chérubin au glaive de flamme sera relevé de sa garde auprès de l’arbre de vie, et aussitôt la création entière sera consumée, et tout ce qui maintenant nous paraît fini et corrompu, nous apparaîtra infini et pur.
Ceci sera obtenu par une amélioration de la jouissance sensuelle.
Mais tout d’abord cette distinction entre le corps humain et l’âme humaine, devra être abolie : ceci je l’obtiendrai, en imprimant selon la méthode infernale, avec des corrosifs, qui dans l’Enfer sont des vulnéraires et des baumes — qui volatilisent les surfaces apparentes et découvrent l’infini que celles-ci dissimulaient.
Si les fenêtres de la perception étaient nettoyées, chaque chose apparaîtrait à l’homme, — ainsi qu’elle l’est — infinie.
Car l’homme s’est lui-même enfermé jusqu’à ne plus rien voir qu’à travers les fissures étroites de sa caverne.