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438 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

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��Ivre, Altovsky se confie étrangement à Thézou de Mor- lange :

« J'ai faim de tout, ma Rébecca. J'ai des désirs de gares voci- férantes, de sifflements, de préparatifs, de contre-ordres. J'ai des désirs de pourboires lancés qui stupéfient, de wagons- restaurants filant cinématographiquement toutes nappes éclatantes fleurs illuminées dos noirs courbés. J'ai des désirs de femmes qui se donnent dans les sleepings, de belles Hongroises qui entr' ouvrent leur porte à minuit dans les grands hôtels. Et dans le noir qui soupire on voit une soie rouge, Rébecca.

« Ah mais je veux aussi hurler, élevé au-dessus des mou- tonnements, et les ouvriers me suivent, et les flammes caressent les églises, les palaces, les casernes et les mauvais lieux ! Et la balle de cette mitrailleuse que les policiers de l'ancien régime ont hissée sur le toit de l'hôtel m'abattra, bouche écumeuse et bras en croix. Et ma belle foule qui gueule et pleure aura un jeune dieu aux cheveux noirs ! »

Thézou aux antiques yeux qui savent, sentencie :

« Mon Jacob, à quoi bon tout ça ? C'est pas prudent, tu sais. »

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��Je me regarde avec affection dans la grande glace, affalé tel un vicomte de Monsieur Charles Mérouvel.

Ma voix s'embrume avec tout à coup des acuités puis de veloutées indulgences grand-ducales pour le garçon que je réclame, paumes complaisam ment battantes.

Je souris en surhomme et petit maître au patron qui me refuse un dernier Claymore.

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