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92 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

peuvent formuler. Ils donnent au public ce qui leur est commun. Et donc ce qui est commun à la plupart des hommes.

Ce que nous donnent les Tharaud, c'est, plus que l'impression, la connaissance. Ils dédaignent le cas individuel, inutile à con- naître. Ils s'emparent d'un grand sujet : une terre ou un peuple, ils traitent ce sujet, ils l'épuisent. Leur héros est toujours un type. Leurs énumérations qui, par le son, évoquent Salammbô, n'excitent pas les sens par des obscurités étranges : elles renseignent, enfoncent chaque trait dans l'esprit. Ils sont très instructifs. Il y a un peu, dans leur manière, du Jeune Anarcharsis.

Il n'est de très clair que le déjà dit ; et ils n'admettent que le clair. Il n'est même rien de parfaitement clair, si ce n'est ces formules d'algèbre ; l'idée exprimée par des mots traîne tou- jours quelque musique. Aussi rencontre-t-on parfois dans Samba DiouJ des échos de l'Odyssée, de Voltaire ou de Chateaubriand.

Mais par où les Tharaud sont uniques, c'est par leur art de composer. Ils ne se perdent pas dans les compositions trop raffinées où l'on oppose les nuances. Cet art n'a rien d'asiatique. Ils peignent par tons simples, presque par blanc et noir. Je veux dire qu'ils mesurent patiemment la largeur et la teinte du trait. Bien mieux ce sont des architectes : ils édifient. Archi- tectes qui n'ont peut-être pas taillé toutes leurs pierres, mais qui ont inventé les jeux de la lumière sur les surfaces, sur les saillies. Il est des monuments plus hardis, plus étonnants, plus délicats ; il en est peu de plus sobrement harmonieux, de plus solides, de plus francs.

PAUL RIVAL

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��L'ESCALIER D'OR par Edmond Jaloux (Renaissance du Livre).

Pour se délasser, entre deux symphonies, un musicien com- pose un ballet. En écrivant ce conte, Edmond Jaloux a voulu se donner et nous donne un « divertissement ». Un vieil oncle autrefois poète qui, dans le vieux quartier du Palais-Royal, offre à sa nièce des bals costumés et des médianoches, jusqu'au jour où la vie impose à la jeune fille l'époux bourgeois qui la guet- tait, tel est le fil léger dont Edmond Jaloux dessine en le dévi-

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