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NOTES IO5

instant, d'entre ses lèvres bleues, un jet brunâtre de salive... " Messieurs, dit à peu près le Capitaine, nous sommes foutus ! Dans une heure VArgo sera désemparée, et je ne ferai rien pour vous sauver (désignant Thérèse)... parce que j'aime Madame!" On devine quel regain d'intérêt le drame peut tirer de cette intervention. Pressé de questions, de prières, le Capitaine finit pas avouer que, non loin, se trouve un sûr ancrage mais qu'il n'y guidera point le navire à moins que ces messieurs ne consentent, sur le champ, à lui livrer la petite Baronne. Silence. Une rafale fait craquer le grand mât... "Allez... murmure le jeune d'Auberval à son amie, — qu'est-ce que cela vous fait ?... puisque vous m'aurez après !" Le Capitaine disparaît, entraînant Thérèse qui sourit. '■ Par- bleu, cet homme me plait ! " s'écrie Biron, saisissant une occasion si propice d'affirmer, par le bluff, la persistance de son caractère. Mais Courtin s'affaisse en sanglotant : " Ne riez pas, Biron, nous sommes deux malheureux "...

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  1. #

��LE POULAILLER par M. Tristan Bernard.

Ceux pour qui une pièce n'existe qu'entre le lever et la chute du rideau, s'étonnent que d'un si mince sujet, M. Tristan Bernard ait su tirer une comédie aussi divertissante. Au contraire, ceux dont le plaisir ne s'achève que lorsqu'ils ont quitté la salle et que, rentrés chez eux, ils peuvent ruminer leurs impressions de théâtre, ceux-là s'émerveillent que de si riches éléments de comédie puissent revêtir une forme si aimablement légère et une apparence si inoffensive. On dit que M. Tristan Bernard pensait à cette pièce depuis trois ans. C'est en effet une œuvre rassise qui doit sa spontanéité non à une conception facile, mais à une écriture rapide et toute de verve.

On pourrait dire que les matériaux de cette pièce forment trois couches superposées et d'âge différent. A la surface, les caprices d'un dialogue où la négligence est une façon de

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