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les effets scéniques. Les uns comme les autres veulent porter loin, et l’on ne voit pas pourquoi des estampes de grande dimension devraient obéir à la même esthétique que de précieuses, mais menues œuvres de portefeuille, pourquoi elles ne prétendraient pas effectivement à la décoration d’une paroi, où des eaux-fortes plus discrètes ne feraient que taches grises.

Qu’on y prenne garde : le romantisme n’est pas, chez un anglais de l’énergique tempérament de M. Brangwyn, une gratuite exubérance. C’est un penchant organique et une habitude morale. Grandeur et petitesse de l’homme ! semblent sans cesse proclamer ces ciels tourmentés, ces usines, ces fumées, ces colossales coques de navires. Mais cette contradiction pascalienne, l’Anglais la constate sans angoisse, avec bon sens bien plutôt et volonté de conquête. Pourvu qu’on ait la force ; Dieu n’est-il pas là pour parer à la faiblesse ? Les grandes compositions de M. Brangwyn respirent l’orgueil et la satisfaction. Elles sont fantastiques, mais posément, sans rien de trouble, avec une imperturbable et magnifique santé. Ou il faut inventer une autre dénomination, ou reconnaître que ce romantisme là est loin d’être comme on l’a dit un peu hasardeusement du romantisme français, " primitivement maladie. " J. S.


JULES RENARD : Nos frères farouches, Ragotte.

Ce qu’il nous faudrait, dit Jules Renard, c’est un second Boileau. ” Comme il a raison ! Et, non content de le dire, il le pense. Pourtant il n’ignore pas à quel point Boileau l’Ancien méconnut La Fontaine : il se doute aussi qu’un second Boileau, si moderne en ses goûts qu’on le suppose, lui ferait biffer les plus pointues de ses Histoires Naturelles, et par exemple, ne lui passerait pas “ l’ongle de la lune qui repousse ” ni “ la course en sac des raisins sur la treille.” Mais que lui coûteraient ces sacrifices, au prix de ceux qu’il exige de soi. Je vois en Jules Renard un Aristide qui se lasserait lui-