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LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

tique était-il opportun pour « décrire » les gestes purement extérieurs de cette femme, sa façon de se poudrer, de se pâmer, de promener sa robe ou de jeter les bras au cou de ses amants ?

Cela, c’est la théorie de la courtisane^ la courtisane en général, schématique, selon sa ressemblance avec toutes ses pareilles. L’auteur n’en conviendra-t-il pas, lui qui disait jadis : " Tout est différent, relatifs nuancé, personnel… Et cet homme qui passe inaperçu ne ressemble pourtant à aucun autre " ? Camille, dira-t-on, n’a pas de personnalité ; elle n’a pas d’âme, et c’est ce qu’il fallait montrer. Mais ce n’est pas ce qu’on nous montre. On ne nous peint que ses gestes, il est vrai, mais ou ne nous peint pas " qu’elle n’a pas d’âme.’ Il fallait, pour cela, la placer dans une situation où ce manque d’âme aurait paru. Il fallait, au besoin, la sortir de son milieu. Car si l’on accorde pour vrai que rien ne puisse arriver dans la maison d’une courtisane, on ne saurait admettre que rien n’arrive dans sa vie. Et ce qui nous importe, c’est la vérité de Camille, non celle de sa maison, de son petit chien, de ses domestiques et de ses belles amies. M. de Faramond se fait gloire d’avoir enfermé son héroïne " chez elle, dans ses mœurs et dans son âme « . Et il s’écrie : » Quoi ! voici une courtisane. Elle perd son amant ou ses amants. Elle en cherche un ou deux autres. Elle les trouve. N’est-ce pas le dessin classique de sa vie, les trois