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39^ LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

l'objet à peindre, considéré non plus seulement comme pré- texte, mais en soi, la passion de l'objet à peindre, de sa soli- dité, de son volume, de sa profonde vérité ; oui, dans ce sens, toute une génération, qu'elle l'admire ou le discute, qu'elle imite ses procédés ou bien en cherche d'autres loin de lui, le suit d'un même cœur à la poursuite de la dure réalité terrestre. Et tel rencontre ainsi Manet, et tel Chardin, presque tous un maître classique. L'abondance des natures mortes indique assez ce besoin de solidité. Il ne faut pas désespérer de voir se hausser la jeune peinture à la compréhension non plus seulement des objets et des paysages, du corps, de la figure humaine, mais encore de ce que cache celle-ci : cette âme que peignait Carrière comme détachée de toute apparence, mais cette fois — et sans littérature — sous un masque vivant de chair.

Henri Ghéon.

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��EXPOSITION LOUIS SUE.

M. Louis Sue n'a réservé qu'heureuses surprises à ceux qui, depuis trois ou quatre ans, suivent avec intérêt sa peinture. Son envoi du dernier Salon d'Automne faisait preuve d'une aisance et d'une grâce singulières. L'exposi- tion à laquelle il nous convie chez Druet réunit l'oeuvre de longs mois. On regrette qu'une date n'accompagne point chaque toile, car dans une aussi rapide évolution, un écart, fût-ce d'une année, donne une signification assez différente aux influences que l'on surprend encore. Celles- ci, par leur diversité — elles vont de Vallotton à Bonnard et de Corot à Cézanne — trahissent la curiosité d'esprit et la recherche bien plus que le manque de conviction. Il n'en est point de tyrannique, et dans les nus, comme dans les fleurs et dans les natures mortes, apparaît une person- nalité charmante qui parfois s'amuse encore à des éclats un peu brusques, mais qui, le plus souvent, s'arrête à de dis- crètes harmonies de gris délicats et à un dessin qui n'éprou-

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