Page:NRF 1909 6.djvu/18

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

488 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

tassent dans une arrière-cour. Des voix contradic- toires jouent à pigeon-voie. Une voiture démarre. Un train crie dans la gare prochaine. Une plainte lointaine et longue s'élève...

Et je pense à quelqu'un que j'aime et qui est si petit d'être si loin, peut-être, par delà des pays noirs, par delà des eaux profondes. Et son regard m'est invisible...

Mauvais cœur... souffle une voix nocturne. Et je songe à l'enfant que j'ai frappé jadis, dans un jardin d'automne tout encagéd'or. — Ce fut un jour étrange, en vérité. Le soleil donnait sa langueur à tout. Les conseils d'amour et de mort parlaient par les bruits les plus vagues. On avait envie d'em- brasser les beaux enfants qui jouaient dans les parcs, auprès des jolies mères, ou de les frapper.

Nous courions sous des arbres très hauts, bien pris dans la lumière, et qui secouaient parfois leurs chaînes de songes, de toute leur taille, à grands bras tristes : Le vent remuait ses bras forts pour aller tourner plus tard, ailleurs, une ronde serrée d'une forme pleine, bouclée d'une crosse aux lueurs minces, avec un bruit fin et qui se calme... Un parti de folioles traînait s'enfuir sur les paumes tièdes de l'air si dense qu'on eût cru le voir... De l'autre côté de la scène, fermé d'une porte épaisse et sombre, une rue pleurait sa chanson mate. Une balançoire qu'on venait de quitter glissait la plainte d'une bête qu'on tourmente. — 11 n'y avait

�� �